jeudi 24 février 2011
- NON, NON et NON !
- Ah ! Ah ! Vous vous repentez ?
- Pas du tout ! Non seulement je ne regrette rien mais je persiste et je signe : « ME, ME ADSUM QUI FECI » !
- C’est le troisième cercle de l’Enfer qui vous attend ! Celui de la pluie éternelle, maudite et froide où Cerbère, bête étrange et cruelle, hurle avec ses trois gueules comme un chien, les yeux rouges, la barbe grasse et noire. Il griffe les esprits, les écorche et dépèce…
- M’en fous ! J’ai des doutes quant à ces scènes de violence sur lesquelles nous venons de deviser. Je regrette parfois de n’avoir été que ce doux crétin qui dessine que des grosses brutes qui s'éclatent joyeusement la tronche à coups de barre à mine, le spécialiste du trench-coat sous la pluie et du 11,43 qui clôt les débats. Mais jamais je n’ai eu le moindre doute sur la qualité de ces représentations ! D’ailleurs, Henri Philippini lui-même n’écrivit-il pas dans son « Encyclopédie de la bande dessinée érotique » : « On peut regretter que ce créateur ne soit pas tenté par une véritable bande dessinée érotique ».
Corvéable à merci
Après avoir été décrite comme le fantôme des années lointaines et hantées, celle qui est devenue l’héroïne de cette page souhaite tirer une morale, laquelle, espère-t-elle, servira de leçon à d’autres :
- Une jeune femme qui épouse un artiste doit exiger un contrat de mariage et y faire impérativement ajouter un appendice.
- Ah ! - S’exclame l’auteur dont l’aspect négligeable, intellectuellement parlant, lui a fait perdre le premier rôle - Et lequel ?
- Que son statut d’épouse ne la prédispose pas à devenir corvéable à merci, selon toutes les fantaisies de l’auteur, et être le genre de modèle que l’on réveille en pleine nuit en lui disant : « Venez donc faire un tour sous mes lampes « FLOOD » ! Je viens d’avoir une illumination et je tiens le thème de la prochaine illustration ! ». « Et cela ne pouvait pas attendre demain matin ? ». « Oh ! Si, cela aurait pu… Mais puisque je vous ai sous la main ! » Pire, les cadences infernales. Ainsi, vous m’avez fait jouer à la suite, c'était dans « PARIS-FRIPON », quatre rôles de strip-teaseuses: Lola Paradise, Nini Taffetas, Lily Pompadour et Paquita Renoir. Bref un état qui frisait le semi-esclavage !
- Quelle exagération!
- Et si, enfin, nous parlions du rôle que vous m'avez distribué dans « Lame Fatale »?
- Non! Non! Pas cela!
mercredi 23 février 2011
... Et la confusion des sentiments.
- Ce pauvre vieux Dante Gabriel était effondré.
- Il se reprochait sa vilaine attitude envers Lizzie ?
- Pas du tout, qu’allez-vous imaginer ? Non, il était amoureux ! L’objet de toutes ses complaisances était dorénavant l’épouse de son meilleur pote : William Morris …
- Jane ? Mince alors ! Et Morris, il disait rien ?
- Non : un bon bougre trop occupé à toucher à tout : tour à tour dessinateur, poète, romancier ou traducteur !
- Aie ! De son côté, Dante Gabriel savait y faire avec les femmes : surtout celles des autres ! Il se dit qu’une suite poétique dédiée à Jane serait du meilleur effet sur elle et l’attacherait à lui pour la vie…
- Hélas, les carnets contenant tous ses poèmes reposaient six pieds sous terre, entre les bras de Lizzie !
- Il s’était tout de suite rendu compte qu’il avait commis une belle connerie! Mais rien n’est irréparable ! Il chargea son agent d’exhumer le cercueil de Lizzie du tombeau familial des Rossetti. Dans la nuit du 5 Octobre 1869, à la lueur vacillante de torches, le factotum s’adonna à la profanation de sépulture dans le cimetière de Highgate. Miracle! Le corps d’Elizabeth Siddal était parfaitement conservé et ses cheveux avaient même si bien poussés qu’ils enserraient le recueil ! Howell dut jouer du ciseau pour le libérer. Il désinfecta ensuite chaque page, les fit sécher avec soin et remit le tout à Dante Gabriel qui le fit vite publier. Le livre connut un grand succès. Mais Rossetti était désormais la proie d’une mystérieuse langueur de l’âme. Il entreprit de la combattre à doses massives d’hydrate de chloral, nouvelle médication dont on devenait rapidement accro. Et Jane Morris se lassa de sa liaison érotico-artistique avec un junkie. Pleine de remord, elle réintégra le domicile conjugal où son mari l’accueillit avec sa complaisance naturelle. Rossetti partit, de son côté, en cure thermale à Birchington-on-sea, dans le Kent. Ce qui lui fut fatal...
- C’est bonne justice! Il nous faut tirer une morale de cette histoire: toute jeune femme qui épouse un artiste devrait exiger un contrat de mariage et y faire impérativement ajouter un appendice.
- Ah ? Et lequel s’il vous plait !
mardi 22 février 2011
Le mélange des genres...
- Le Syndicat des Modèles ne put rien faire pour sauver Elisabeth Siddal - dite Lizzie - une fois qu’elle eût épousé Dante Gabriel Rossetti…
- Dante Gabriel était un garçon imprégné de hautes valeurs morales, qu’il exaltait dans son art, mais qui semblait incapable de les pratiquer dans la réalité. Ainsi, il avait prit comme maîtresse Fanny Cornforth que chacun peut découvrir sous les traits de « La belle Rosemonde ». En même temps, profitant d’un voyage au Moyen-Orient de son ami Holman Hunt, il se lança dans une liaison avec la fiancée de ce dernier, Annie Miller : ce qui, d’une manière assez incompréhensible, refroidit la chaude amitié de Hunt envers lui. Qu’importe ! Dante Gabriel se lia alors avec John Ruskin dont la jeune épouse Effie venait de rejoindre Millais. Jamais le Syndicat des Modèles ne fut autant sollicité mais sans pouvoir vraiment intervenir tant le mélange des genres et la confusion des sentiments étaient grands! Quoiqu’il en soit, un soir Lizzie absorba, un soir où son époux travaillait avec Fanny, une dose de Laudanum dix fois supérieure à la prescription médicale. Et ce dont les bains glacés de Millais n’avaient pu s’acquitter, le Laudanum le fit!
- Exactement ! Lizzie fut enterrée au cimetière de Highgate et, empli de remord, Dante Gabriel fit placer, dans le cercueil, un précieux cahier contenant tous ses poèmes. A peine fut-il revenu dans sa maison Tudor de Chelsea, que notre peintre se demanda s’il n’avait pas fait une belle connerie. Et ni les Wombats, ni les Paons et ni les Kangourous qui s’y baladaient ne purent le distraire de ce tourment... Non ! …
- Quoi, que dites-vous ?
- Sur ce dessin, vous m’étranglez encore !
- Que voulez-vous, il fallait bien que je gagne ma vie ! Ce qui me rappelle... Dans son dernier film, « Les trois font la paire », Sacha Guitry conclut lui-même le récit, assis derrière son bureau : « Je m’en serais voulu de passer pour complaisant à l’égard des criminels… Mais, d’autre part, qu’il y ait des criminels, je l’admets volontiers : il faut bien que tout le monde vive ! »
lundi 21 février 2011
« Sachez que tout cela n’a rien de personnel! »
- On peut dire que vous m’en avez fait voir de toutes les couleurs…
- Compte tenu de votre situation sur ce dessin, l’expression est osée !
- Zut et crotte ! Comme j’ai été sotte de m’abandonner, par dévouement envers vous, à toutes les fantaisies qui vous traversaient l’esprit.
- Tout cela n’avait rien de personnel, si cela peut vous consoler ! Je ne faisais que mettre en scène ce que d’autres avaient imaginé !
- Vous pouvez jurer que tout ce que vous avez représenté là était bien contenu dans les romans ?
- Non, je ne peux m’y engager formellement! Je pense cependant que la situation était sous-entendue ou, du moins, ne pouvait être écartée !
- Ah ! Vous faites bien partie de ces hommes qui, « s’ils semblent détester leur péché, ne cessent pas pour autant d’en aimer l’objet et d’en entretenir les occasions »!
- Cela me plait beaucoup: Sénèque ? Aristote ? Horace ?
- Non, mon pauvre ami : Bossuet !
- Bossuet ? Mais c’est mon préféré !
- N’empêche - Reprit-elle - D’autres ont été plus pugnaces. Vous rappelez-vous de ce porte-folios que nous avions acheté et qui contenait de si belles reproductions d’un fameux peintre préraphaélite ?
- Ce bon vieux timbré de Dante Gabriel ?
- Voilà. Je me souviens de cette anecdote concernant celle qui devint, elle aussi pour son malheur, son épouse.
- Oh, oui: une histoire !
- Elisabeth Siddal - dite Lizzie- travaillait comme apprentie chez un modiste. Activité si peu rémunératrice qu’elle fut contrainte de servir de modèle pour la célèbre Ophélie de John Everett Millais. Ce dernier l’avait fait s’allonger toute habillée dans une baignoire dont l’eau était chauffée par des bougies posées en dessous. Ce qui n’empêcha pas Lizzie de chopper une bonne pneumonie. Entre deux quintes de toux, elle réussit cependant à se plaindre auprès du Syndicat des Modèles, lequel venait d’être crée. Ce dernier menaça de poursuivre le peintre qui dut se résoudre à régler les honoraires du médecin et à lui verser mensuellement une rente confortable...
- N’importe quel peintre ayant deux sous de cervelle veille à ne jamais employer des modèles faibles des bronches, à moins d’envisager un portrait de Marguerite Gautier!
dimanche 20 février 2011
Parce que vous appelez cela un métier ?
- Ah ! Vous n’aviez pas bien vu ? Sans doute n’avez plus les yeux de vos vingt ans: c’est la dure loi de la nature ! Constatez sur quel format vous travaillez alors...
- 27 x 41 cm ? Mais j’étais alors un véritable « miniaturiste » !
- Du coup, vous produisiez énormément et réalisiez une couverture en deux, trois jours. Et maintenant, quelle est votre cadence : une tous les deux ou trois mois !
- C'est surtout que nous formions une équipe de choc, capable de répondre à la demande dans l'heure qui suivait...
- Quelle consolation: moi pauvre victime vouée à l’ombre et vous triomphant dans la lumière !
- Oh! Regardez dans le coin en haut et à gauche : les fonds étaient faits avec des trames NORMATEX, ces feuilles que l'on frottait avec une petite spatule en métal. L'ordinateur a ruiné ce commerce comme celui des lettres LETRASET!
- Ne détournez pas la conversation! Tant de complaisances, c’est indigne ! N'avez-vous jamais regretté que la fonction féminine se résume, dans la plupart de vos petites mascarades, à un effeuillage suivi d’une mort violente, administrée par divers instruments domestiques, souvent de cuisine ou de jardinage?
- M’enfin ! C’est comme au théâtre : personne ne meurt pour de vrai. Ce sont des serments de mascarade et des larmes imaginaires. Ainsi mes personnages regardent souvent le spectateur comme pour lui souffler, en aparté : « Ne vous inquiétez pas : tout ça, c’est une comédie : je reviendrai à la fin de la pièce pour saluer le public ! »
- N’empêche que ce traitement réaliste, et qui est votre style, trouble. Ma famille et mes amis disaient à votre sujet: « Dessiner des assassinats, c’est pas un métier ! »
- Oh ! Cela me rappelle une scène dans « Entrée des Artistes »… Louis Jouvet joue le rôle du professeur Lambertin. Il se rend chez un ancien adjudant reconverti dans la blanchisserie, Grenaison, et qui est le père d’une de des élèves, Isabelle. Lambertin s’adresse tout d’abord à la tante de cette dernière :
« Les parents sont bien coupables qui ne respectent plus les cheveux blonds ou bruns de la jeunesse. Cette enfant est un sujet de premier ordre et vous n’avez pas le droit de lui gâcher la vie sous le prétexte assez vain que vous lui tenez lieu de mère en qualité de tante ! C’est une Amoureuse… »
« Comment ? » – S’alarme Grenaison.
« Je parle de son emploi » – le rassure Lambertin.
« Amoureuse, ce n’est pas un métier ! »
« Ah ! Parce que laver en famille le linge sale des autres, vous appelez cela un métier ? Vous n’’êtes pas dégoûtés !... »
Cités et Lieux inventés.
- Au fait, vous n’avez jamais illustré Nestor Burma ?
- Heu, non... Enfin, je crois pas… Les éditeurs ont du pensé que je connaissais trop mal Paris pour illustrer ces romans-là. J’étais plutôt reconnu comme le spécialiste d’une Amérique à la fois feuilletonnesque et fantaisiste…
- USA où vous n’aviez jamais mis les pieds !
- Non ! Et Léo Malet non plus… A une américaine qui s’étonnait auprès de l’épouse de ce dernier de la grande science qu’avait l’auteur des mœurs criminelles et du milieu de l’UNDERWORLD : « Votre mari a du vivre longtemps aux États-Unis ? »
- Pas du tout : le plus grand voyage qu’il ait fait, c’est Paris-Montpellier !
- Au sujet de ces cités plus inventées que réelles, François Guérif note: « C’est une ville imprécise, semblable à n’importe quelle métropole américaine ». Jacques Baudou renchérit : « La ville est la véritable STAR mais, paradoxalement, elle est très faiblement caractérisée… » Ainsi, « l'inscription de quelques noms propres suffit à ancrer le scénario dans la réalité américaine. Ce procédé crée artificiellement des lieux intérieurs ou extérieurs complètement stéréotypés tels une rue déserte dans un quartier sinistre, un terrain vague, un hôtel sordide ou une usine désaffectée. La ville est comme vidée de son contenu pour mieux déployer son rêve. Elle permet d'enchâsser des décors oniriques et hallucinés qui prennent l'allure de visions »...
- Ah - reprit-elle - mais nous avons quitté la métropole pour visiter un autre lieu de mémoire : les plages qui s’étendent au bout de la cité et où le syndicat du crime amènent ses proies pour leur dernier voyage !
- Oui, une scène follement sentimentale : voyez comme le héros la tient tendrement …
- Quelle blague : il lui administre plutôt les derniers sacrements !
- ‘ffectivement ! Je n’avais pas bien vu…
samedi 19 février 2011
« Hell Fire Club »
- Comment s’appelait donc cette singulière Confrérie dont vous nous entretenez dans « La Meilleure Façon de Tuer son Prochain » ?
- Oh, le « Hell Fire Club »?
- Voilà ! Vous en aviez trouvé le récit dans « De l'assassinat considéré comme un des beaux-arts » de Thomas de Quincey, c’est cela ?
- Exactement ! En Angleterre, au début du dix...-huitième siècle, certains clubs se multiplièrent : leur vocation était de bafouer la morale et la religion. Ainsi en fut-il de la Société pour la propagation du vice : le « Hell Fire Club », fondé par sir Francis Dashwood et qui tenait ses assises dans un ancien monastère cistercien du Buckinghamshire. Officiellement dissous, ce club survécu secrètement tandis que sa raison sociale devenait « société pour l’encouragement au meurtre.
- Vous-même auriez pu, avec succès, postuler pour une place de membre actif dans cette singulière association. Car vous faites bien partie de ces gens qui démentent le vieux dicton selon lequel le crime ne paierait pas : c’était même devenu pour vous un véritable fond de commerce ! Hélas, j’étais votre victime favorite, occise ou terrorisée de toutes les manières possibles... Et ici, en quelle occasion jouais-je pour vous les boucliers humains ?
- « Johnny Metal », un personnage crée par Léo Malet en 1941. Metal, l’anagramme de Malet, vous me suivez ?
vendredi 18 février 2011
« Le Syndicat des Modèles »
- Vous plaindre auprès du puissant « Syndicat des Modèles »? Non, vous ne pouviez pas faire cela : ma carrière eût été brisée !
- Exactement ! Car « LE SYNDICAT » en a rompu de plus coriaces que vous et de plus endurcis encore au péché… Ainsi, il a mit fin aux cruautés et aux sévices, qu’exerçaient les peintres antiques sur leurs modèles. En ces temps lointains, l’artiste à la mode s’appelait Parrhasios. La Cité lui commanda un Prométhée pour le temple d’Athéna. Aussi sec, Parrhasios livra un esclave à la question, en lui recommandant de bien prendre une expression de souffrance.
Tandis que le peintre préparait ses poudres, ses couleurs et ses liants, le bourreau jouait du tison ardent, de la tenaille et autre chevalet. Mais Parrhasios n’était pas satisfait de son modèle et lui fit sèchement remarquer : « Tes gémissements ne sont pas encore ceux d’un homme poursuivi par le courroux de Zeus! Bourreau, torture-le encore et encore... Ah !... Voilà qui est mieux : je commence à voir le visage de Prométhée déchiré !... »
Après mille douleurs, l’esclave entra en agonie et alors qu’il expirait, Parrhasios s’exclama : « Enfin tu témoignes de bonne volonté : Reste comme cela. Tu es parfait ! »
- C’est encore une histoire de romains ?
- Non, mon pauvre ami : c’est une histoire de grecs !
jeudi 17 février 2011
« Entrée des Artistes »
- Vous rappelez-vous de la première fois où, profitant de la situation et me prenant pour ainsi dire en otage, vous me fîtes interpréter un de vos personnages ?
- Là, et pour ainsi dire à brûle-pourpoint, non ! Mais cela va me revenir…
- Je vais vous aider, nous gagnerons du temps ! C’était pour une couverture de la toute jeune collection « Le miroir obscur » : « A MORT L’AN NEUF », de Patrick Quentin…
- Mince alors ! On dirait une strangulation...
- Tels furent mes débuts sur scène!
- Pour jouer un rôle si délicat, pouvais-je mieux placer ma confiance qu’en vous?
- Pour m’amadouer, vous m’aviez cité cette tirade dite par Louis Jouvet dans « Entrée des Artistes » où il tient le rôle d'un professeur de conservatoire dramatique : « Le théâtre est fait de toutes les joies du monde. Rien n’est faux. Il suffit d’avoir un peu la foi et tout devient réel : les larmes imaginaires et les serments de mascarade. Comme moi, vous vivrez plusieurs existences passionnantes et compliquées, pathétiques et cocasses. Croyez-moi, c’est quand le rideau se lève que votre vie commence. Il ne tient qu’à vous qu’elle continue le rideau baissé : Il suffit, après avoir cru en vos personnages, de croire un peu en vous ». Servez-vous toujours, à vos victimes, le même boniment ?
- Quelle idée !
- En tous cas, ce fut le début d’une longue suite de maltraitances et j’ai été bête de me laisser faire : j’aurais du me plaindre, auprès du puissant Syndicat des Modèles, de tous les mauvais traitements que, durant dix ans, vous m’avez infligés !
mercredi 16 février 2011
Ce que disaient les Patriciens, à Rome...
- Et si nous parlions de Jupiter ?
- By Jove ! Vous ? Mais que faites-vous ici?
- Je me suis dit qu'il convenait de trouver un rebondissement inattendu dans votre script dont l'intrigue menaçait de s'enliser! D'où ma venue, celle du Fantôme venu des années lointaines...
- Non?
- Si! Mais revenons à Jupiter… Vous connaissez bien sûr ce tableau de Watteau « Jupiter et Antiope » et qui est exposé au musée du Louvre. Je vous en rappelle cependant l’argument : Le suzerain des Dieux, qui a pris l'apparence d'un Satyre, vient de séduire Antiope. Comblée, elle pique ensuite un petit roupillon. Jupiter en profite et s’abîme dans la contemplation de la croupe de la belle endormie.
- Je n’ai jamais compris Jupiter. Ce type est l’autorité suprême sur l’Olympe et tous les autres Dieux sont dépendants de lui. Cependant, dès qu’il désire une fille, il faut qu’il recoure à des stratagèmes idiots : devenir une pluie d’or pour posséder Danaé ou prendre l’apparence d’un cygne pour se taper Léda...
- Et vous auriez vu la chose comment, vous ?
- Qu’il se conduise comme les patriciens, à Rome, qui tendaient le doigt et disaient: Te paedico ou Te irrumo. C’était la norme sous Cicéron, à la fin de la République ou encore celle de Sénèque, sous l’Empire. Attention ! Je dis pas que c’était cool, bien au contraire : mais Jupiter n’avait qu’un mot à dire, « JE TE VEUX », et l’affaire était réglée !
- C'est l’histoire de l’Art qui en aurait été bouleversée ! Y aurait-il simplement, et à ce compte-là, une histoire de l’Art ? Ce n'est pas seulement Watteau qui aurait été à cours de sujets mais aussi Le Corrège, le Titien, Andrea del Sarto et François Boucher...
- Oups ! Je n’y avais pas songé…
samedi 12 février 2011
- Allo ?... Ma chérie ?... Je suis retenu par une audition !...
Oh! Je viens de retrouver un EKTA, dans une boite bien rangée. Si bien rangée, même, que je l'avais oubliée. Suit un SCAN difficile, avec une infinité de réglages en post-production pour obtenir un résultat qui me satisfasse un peu. Une histoire de couple encore et, ne me souvenant plus de l'intrigue originelle, j'en improvise une nouvelle:
- Allo ?... Ma chérie ?... Oui, c’est Charles ! Charles, votre époux : c’est cela !... Pardon ?... Non, hélas ! Et, d’ailleurs, c’est la raison pour laquelle je vous appelle : je suis retenu par une audition !... Ah, ce soir, c’était l’anniversaire de Paul : quelle malchance !... Oui, je me rappelle : c’est de notre fils dont il s’agit ! Ah, si vous croyez que c’est une partie de plaisir à laquelle je dois faire face!... Hein ?... Quelque femelle imprégnée de senteurs fauves ? Non ! Non ! Quelle imagination ! C’est malheureusement d’un homme dont il s’agit : pire, un cabot de l’espèce la plus insupportable. Hum ?... Pourquoi je lui accorde mon temps ? C'est qu'il s’agit d’une découverte personnelle de mon producteur… Oui, ce garçon gras comme une mère maquerelle qui tient un commerce prospère ! Je sais, vous ne l’aimez pas mais c’est un devoir auquel je ne saurais me soustraire. Non! Non! Faites-moi plaisir: ne pleurez pas! Comment?... Ah, certes: la vie artistique est une longue suite de sacrifices, à commencer par celui de sa famille, je sais. Mais je suis le premier à en souffrir !
jeudi 10 février 2011
Ostende
Je me souviens d’Ostende :
« Ni gris ni verts, ni gris ni verts
Comme à Ostende et comme partout
Quand sur la ville tombe la pluie
Et qu'on s'demande si c'est utile
Et puis surtout si ça vaut l'coup
Si ça vaut l'coup d'vivre sa vie »
Chantait Léo Ferré, sur des paroles de Jean-Roger Caussimon, et en parlant des yeux en amandes d'une barmaid beaucoup trop jeune pour l'un ou pour l'autre, ils auraient du s'en rendre compte!
Ostende, donc.
Comme rien n’est simple dans la vie, ou plutôt que tout s’emmêle dans les fils inextricables de ma mémoire vagabonde, la cité du peintre James Ensor est indissociablement liée au souvenir de Marvin Gaye. « Mes souvenirs d’enfance sont de bons souvenirs : j’étais alors en paix… » dit l'artiste exilé, en voix off, seul sur le pont avant d'un navire qui se rapproche des côtes. Puis « What’s going home » commence...
mercredi 9 février 2011
Je me souviens d'un temps...
Je me souviens d'un temps... Hein? Que dites-vous ?... « D’un temps où la vie était plus belle / Et le soleil plus brûlant qu'aujourd'hui? ». Non ! Ce n’est pas de cette chanson-là dont je voulais vous parler. Ni d’aucune autre d’ailleurs ! C’était un message personnel. Je reprends. Je me souviens d’un temps où trouver des modèles faisait dans le genre fastoche. La procédure était simple : j’alpaguais tous ceux qui avaient la mauvaise idée de s’approcher de mon STUDIO, devenu une monstrueuse toile d’araignée au centre de laquelle j’attendais mes victimes, plus ou moins consentantes ! A commencer par la plus proche !
mardi 8 février 2011
« LE BAISER »
Je viens de scanner une diapositive (c’était une sorte de ruban d’acétate enduit d’une émulsion contenant des composés sensibles à la lumière et qui s’enroulait dans une petite bobine métallique, le tout donnant des images en couleurs !... Pardon ?... Voilà, comme un numérique mais en mieux !) En principe, un illustrateur vit de la reproduction de ses dessins et n’est donc pas tenu par la contrainte de vendre ses originaux. Mais vous connaissez sans doute aussi la chanson : celle de « La vie d’artiste », l’histoire de cette fameuse fin du mois qui revient sept fois par semaine ! Ainsi, j’ai vendu « LE BAISER ». Je me le suis toujours reproché.
lundi 7 février 2011
COTTON CLUB
Georges Perec écrivit: « Je me souviens d'un fromage qui s'appelait « la Vache sérieuse ». « La Vache qui rit » lui a fait un procès et l'a gagné) ». A propos de cette affaire de « Vache Sérieuse », ma mémoire est assez défaillante, mais je me souviens très bien, par contre, que j'ai dessiné l'affiche française du film COTTON CLUB de Francis Ford Coppola. Je me rappelle même que La Gaumont m'avait, en fait, contacté pour réaliser le carton d'invitation. Enfin « that kind of stuff »! Et c'est devenu l'affiche: me demandez pas comment ou pourquoi. A cette époque (1984), j'étais nettement plus jeune et je ne me posais jamais de questions: j'agissais!...
Plus tard, pour les sorties en DVD, une autre affiche fut reprise en couverture. Mais je découvre que « STUDIO CANAL » vient de ressortir ce film, dans la collection « CLASSICS », avec l'affiche originale, la mienne donc: le côté « VINTAGE », sans doute.
Je me ballade dorénavant entre le Musée et la Collection!
samedi 5 février 2011
« CHANDLER FOR EVER »
Voyage au bout de ma mémoire défaillante: j'ai même illustré un article de Patricia Highsmith et joliment appellé « CHANDLER FOR EVER »! Si! Si! Je vous assure: c'était dans le « Magazine Littéraire » du mois d'octobre 1984 (Ah! Vous voyez: j'ai une bonne raison d'avoir oublié, c'était le siècle dernier!) et consacré à Raymond Chandler, classique du roman noir. Je ne sais où se trouve l'original (d'où aussi cet oubli) mais je viens de retrouver un EKTA et que voilà, scanné. Sur la reproduction, j'avais ajouté un phylactère: Raymond Chandler devant The Hollywood Public Library où Philip Marlowe consulte « Les éditions originales célèbres ».
Fascinant, n'est-ce pas?
vendredi 4 février 2011
Je ne me répète pas, je bégaye seulement un brin!
Finalement, pour toutes sortes de raisons, je passe un temps infini à revisiter
mon passé: articles, biographies ou catalogues. Et du coup, je redécouvre, souvent
avec étonnement, pour quelle revue ou pour quel magazine certains dessins avaient
été réalisés. Ainsi, celui-ci avait été publié dans la revue « AUTREMENT », consacrée
aux « Faits Divers », une rubrique dont je ne sors décidément pas. Avouons-le,
c'est moins une vocation qu'une espèce de malédiction! Ce numéro s'appelait «
Annales des passions excessives ». L'histoire, inventée par moi-même, était déjà
une variation sur le thème « Artiste (un agité du bocal de première ou THE BIG
BAD WOLF) et Modèle (toujours une pauvre innocente, LE PETIT CHAPERON ROUGE, en
somme!) ». Et si, finalement, on ne faisait que tourner en rond autour de deux
ou trois thèmes?... Mais non, quelle affreuse idée: je ne me répète pas, je bégaye
seulement un brin!
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